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Retour05 mars 2021
Jean-Marc Gilbert - jmgilbert@lexismedia.ca
Réal Leclerc exclu de l’ADT
EXPÉDITIONS DE PÊCHE ET PRÊT NON DÉCLARÉ
©Archives
Le doyen du conseil municipal, Réal Leclerc, a été exclu du caucus de l'Alliance démocratique Terrebonne. (Photo: archives)
Réal Leclerc, doyen du conseil municipal et nommé leader de l’opposition par Marc-André Plante alors que ce dernier briguait la mairie en 2017, a été exclu de l’Alliance démocratique Terrebonne (ADT) en raison de rumeurs persistantes au sujet de voyages de pêche payés en partie par des fournisseurs de la Ville et d’un emprunt de plus de 10 000 $ jamais déclaré, contracté aussi auprès d’un fournisseur.
La nouvelle, qui a eu l’effet d’une bombe à l’Hôtel de Ville, a été annoncée par le parti dans un communiqué de presse diffusé discrètement vendredi, en fin de journée.
Plus de détails ont été révélés lors d’un point de presse réunissant tous les membres du caucus de l’ADT, lundi après-midi.
En novembre dernier, à la suite de rumeurs datant de quelques années et ayant refait surface, le caucus de la formation politique a décidé de confronter Réal Leclerc, une fois pour toutes, en lui demandant de lire la déclaration assermentée faite à l’Unité permanente anticorruption (UPAC) en août 2016.
« Lors de cette rencontre, les membres du caucus ont appris qu’en 2005 et en 2006, M. Leclerc avait participé à des expéditions de pêche dont les frais de séjour, excluant la nourriture, avaient été payés par des fournisseurs de la Ville de Terrebonne. Les membres ont également appris que M. Leclerc avait contracté un prêt personnel de plus de 10 000 $ auprès d’un fournisseur de la Ville, prêt qui n’a jamais été déclaré dans ses déclarations obligatoires comme le prescrit la loi », peut-on lire dans le communiqué.
Bien que le parti ne reproche à M. Leclerc aucun manquement à l’éthique et à la déontologie municipales depuis son élection sous la bannière de l’ADT en 2017, « le caucus jugeait impossible la poursuite de sa collaboration avec ce dernier », ajoute-t-on.
En conférence de presse lundi, plusieurs collègues de M. Leclerc ont dit s’être sentis « choqués », « bernés » et « blessés » de ces révélations, puisque l’ex-policier élu pour la première fois comme conseiller municipal de Terrebonne-Ouest en 2001 disait continuellement n’avoir rien à se reprocher et répétait qu’on pouvait lui faire confiance.
« Si M. Leclerc avait déclaré quoi que ce soit au sujet de ces faits, je n’aurais pas recommandé sa candidature à l’ADT », a ajouté Annie Claude De Paoli, avocate du parti, qui était notamment responsable de faire des vérifications sur le passé des candidats potentiels avant le scrutin de 2017. Elle reconnaît que ce processus pourrait être amélioré. Et il le sera, assure-t-elle.
Le maire savait en partie
Pourtant, le chef de l’ADT, Marc-André Plante, savait que M. Leclerc avait pris part à deux voyages de pêche en 2005 et en 2006. Toutefois, le conseiller aurait toujours soutenu avoir payé pour toutes ses dépenses, soutient M. Plante. De plus, il y a 15 ans, les codes d’éthique auxquels étaient soumis les élus municipaux n’avaient pas le même mordant qu’aujourd’hui. Ce que M. Leclerc a fait n’était pas contraire aux règles alors en vigueur.
Cependant, le maire assure qu’il n’avait aucune certitude au sujet de l’emprunt, malgré les rumeurs. Ce n’est qu’en novembre, tout comme les membres de son caucus, qu’il aurait appris son existence. L’emprunt n’aurait jamais été inscrit dans les déclarations d’intérêts pécuniaires de l’élu, comme le prescrit la loi lorsqu’ils excèdent 2 000 $.
Par ailleurs, si le caucus sait tout cela depuis novembre, pourquoi expulser M. Leclerc près de quatre mois plus tard? « Nous avons demandé à M. Leclerc de se retirer lui-même et de s’expliquer à la population à plusieurs reprises. Il a toujours refusé », soutient le chef de l’ADT. De plus, nous dit-on, le parti voulait prendre le temps de s’assurer de ce qu’il pouvait dévoiler pour ne pas nuire au procès de l’ex-maire Jean-Marc Robitaille et de ses coaccusés, actuellement en cours.
Réal Leclerc réplique
Réal Leclerc ne nie pas les faits. Bien qu’il ne veuille pas, pour l’instant, dévoiler l’entièreté de sa déclaration assermentée de 2016, il a révélé à La Revue certaines informations supplémentaires qui figureraient dans cette déclaration, dit-il.
« La seule chose qui était payée dans les voyages de pêche, c’était l’hébergement pour la fin de semaine. C’est moi qui ai payé pour tout le reste », affirme-t-il en entrevue.
Il ajoute que l’emprunt en était un de 15 000 $, contracté auprès de l’entrepreneur Normand Trudel. Il l’aurait remboursé seulement quelques mois plus tard, rapporte-t-il.
« Je suis prêt à passer un test de polygraphe demain matin », lance l’ancien policier, tout en accusant Marc-André Plante de mentir au sujet de l’emprunt et de « jouer sur les mots » au sujet des séjours de pêche.
Le conseiller du quartier 4 depuis 20 ans souhaite attendre quelques jours avant de s’expliquer davantage. Néanmoins, il est clair dans son esprit que la décision de l’exclure du parti repose davantage sur le fait qu’il s’opposait entre autres à la reconduction d’Alain Marcoux à titre de directeur général de la Ville pour deux ans. Par ailleurs, il est certain, selon M. Leclerc, que « l’ADT avait des craintes que cette histoire refasse surface en campagne électorale et de devoir s’expliquer » sur le sujet.
Répétant n’avoir rien à se reprocher, le conseiller, qui aura 69 ans plus tard ce mois-ci, non seulement terminera son mandat actuel, mais se présentera à nouveau comme candidat indépendant pour le scrutin de cet automne, si sa santé le lui permet.
Le Mouvement Terrebonne réagit
Le Mouvement Terrebonne (MT) a réagi à cette nouvelle en y allant d’une charge à fond de train contre Marc-André Plante et son administration. Dans un communiqué de presse, le MT dénonce « le laxisme du maire Plante » et « son sens de l’éthique pour le moins élastique », en plus d’accuser le premier magistrat de mentir.
« Ça fait longtemps que l’on sait que ce maire ment à la population. Parlez-en aux employés de la Ville. Parlez-en à la conseillère Caroline Desbiens. Parlez-en à ses anciens employés de cabinet. C’est rare que je sois d’accord avec Réal Leclerc, mais là, je pense qu’il a raison. En 2016-2017, ça faisait bien l’affaire du maire d’aller chercher Réal Leclerc pour fonder son équipe. Aujourd’hui, il a changé d’avis », explique André Fontaine.
« Le maire Plante a choisi de cacher ces informations inquiétantes […] Maintenant, il refuse d’assumer son manque de jugement et préfère continuer de mentir en espérant avoir le temps de faire oublier le tout avant la prochaine élection. Il doit des excuses aux citoyens », ajoute le conseiller Marc-André Michaud.
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