Implants mammaires sous haute surveillance

Même si la «maladie des implants mammaires» n’est pas officiellement reconnue, de plus en plus de femmes se manifestent et affirment que ces implants ont changé leur vie pour le pire. Les cas qui se multiplient et les résultats d’une récente étude incitent Santé Canada à agir.

Depuis novembre 2018, Santé Canada enquête sur certains implants mammaires à la suite d’une augmentation du nombre de cas de lymphomes anaplasiques à grandes cellules associés aux implants mammaires (LAGC-AIM), soit une forme rare de cancer du système immunitaire. Sur 28 cas canadiens confirmés de ce lymphome, 24 cas, soit 86 %, impliquent un implant mammaire Biocell du fabricant Allergan, affirme Santé Canada dans un avis rendu public au début du mois d’avril. L’organisme de réglementation a alors manifesté son intention de suspendre les permis pour les implants mammaires Biocell et donc d’en interdire la vente au Canada si Allergan ne fournit pas de preuves suffisantes de l’innocuité de ses implants mammaires texturés dans un délai de 15 jours civils. Au moment de mettre sous presse, ce délai n’était toujours pas terminé.

Un début

Or, cela ne concerne que les implants mammaires texturés. Les quatre femmes moulinoises que nous avons rencontrées (voir texte en page 4) portaient jusqu’à tout récemment des implants non texturés. Si elles saluent ce premier pas de Santé Canada, elles souhaitent une enquête plus large concernant tous les types d’implants mammaires. De ce côté, le chef des relations médias, Eric Morrissette, indique que Santé Canada suit la situation de près et prendra d’autres mesures au besoin, selon les résultats de ses examens. Le meilleur conseil que M. Morrissette peut donner aux femmes qui vivent des problèmes de santé qu’elles croient reliés aux implants est de consulter un professionnel de la santé, puisque chaque cas est unique.

Quelques chiffres

Le gouvernement provincial estime à 145 000 le nombre de femmes porteuses d’implants mammaires au Québec, tous types confondus. De ce nombre, moins de 10 % sont porteuses d’implants texturés. Si ces dernières courent un «risque augmenté» de développer un LAGC-AIM, ce risque demeure «très faible» et se situerait entre 1 cas sur 3 817 et 1 cas sur 30 000. Le LAGC-AIM survient chez les personnes autant avec des implants remplis de solution saline qu’avec des implants de gel de silicone.

Maladie reconnue?

Néanmoins, outre le LAGC-AIM, est-ce possible qu’il existe réellement une «maladie des implants mammaires» qui se traduirait par différents symptômes chez certaines porteuses d’implants (tous types confondus), symptômes qui semblent disparaître lorsque les femmes se font retirer leurs implants? Santé Canada évite la question en nous invitant plutôt à communiquer avec le Collège des médecins, puisque «cela relève du diagnostic», de dire M. Morrissette. Au Collège, on affirme ne pas avoir de position sur cette question, répond la coordonnatrice aux communications, Annie-Claude Bélisle.

Une meilleure sensibilisation

Les quatre femmes de Terrebonne et de Mascouche qui ont accepté de témoigner de leur expérience pour ce reportage affirment toutes ne pas avoir été suffisamment bien informées par leur chirurgien quant aux risques potentiels des implants. «Quand une patiente va voir un chirurgien, il faut qu’il lui dise quels sont les risques associés», exige l’une de ces femmes, Cinthia Davidson Audet, qui souhaite «sensibiliser les femmes sans leur faire peur». Au Collège des médecins, Mme Bélisle affirme que les médecins ont une obligation de déclarer aux patientes tous les risques qu’ils connaissent. Les patientes qui ont le sentiment que ce devoir n’a pas été respecté par leur médecin peuvent porter plainte. Notons que des recours collectifs s’organisent actuellement contre des fabricants d’implants mammaires texturés. Une demande d’autorisation a été déposée en Cour supérieure par le cabinet LPC Avocat en janvier.   LISEZ AUSSI : https://www.larevue.qc.ca/des-implants-synonymes-de-tourments/